Dans le silence pesant d’une cellule de prison, une femme attend son sort. Elle s’appelle Olympe de Gouges et son crime, c’est d’avoir cru que la Révolution pouvait être aussi celle des femmes. À la salle André Malraux de Sarcelles, le dimanche 8 mars, pour la Journée internationale des droits des femmes, le public a découvert « Olympe », un seul-en-scène porté avec une intensité remarquable par Firmine Richard. La Guadeloupéenne incarne un combat d’actualité brûlant dans ce spectacle, donnant chair aux luttes d’hier et résonnant avec leur modernité brûlante.
Un texte puissant, une comédienne engagée
Les grandes figures de l’histoire ne sont pas seulement celles qu’on nous enseigne dans les manuels : elles sont aussi celles qu’on a cherché à faire taire. Olympe de Gouges, intellectuelle du XVIIIe siècle, autrice de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, abolitionniste convaincue, a payé ses idéaux au prix fort. L’auteur et metteur en scène Franck Salin (Frankito) s’est emparé de son histoire pour en faire un monologue d’une heure dix, écrit à partir de ses textes et de sa correspondance, où chaque mot claque comme un manifeste.
Et qui mieux que Firmine Richard pour lui prêter sa voix ? La comédienne, habituée aux plateaux de cinéma, relève ici le défi du théâtre avec une puissance rare. Sur scène, elle ne joue pas Olympe : elle l’incarne, avec tout ce que cela exige de force et de fragilité mêlées. Son interprétation est tour à tour ardente, désespérée, vibrante de détermination. Son accent créole et son charisme naturel apportent une dimension nouvelle à cette figure historique, créant une passerelle entre la Révolution et les combats contemporains contre le racisme et le sexisme.
Une mise en scène sobre, une émotion brute.
Franck Salin a opté pour une scénographie minimaliste : une cellule, un lit qui devient tantôt tribune, tantôt calèche, tantôt radeau d’une pensée insoumise. La lumière découpe l’espace, souligne les instants de doute, les élans de révolte. Mais c’est surtout la musique d’Edmony Krater, percussionniste et compositeur guadeloupéen, qui insuffle à la pièce un souffle singulier. Les percussions du gwoka, en dialogue avec la musique baroque européenne, tissent une bande sonore qui accompagne la voix d’Olympe comme un battement de cœur ancestral.
Et puis, il y a ces silences. Ces pauses où le regard de Firmine Richard semble défier le public, le mettre face à sa propre histoire. Parce que cette pièce n’est pas qu’un hommage : c’est une interpellation. Plus de deux siècles après la mort d’Olympe de Gouges, où en est-on vraiment de la liberté et de l’égalité ?
Un échange vibrant avec le public
À la fin du spectacle, Firmine Richard et Franck Salin sont montés sur scène pour un échange avec le public. Un moment suspendu, où l’actrice a partagé son désir de longue date d’un seul-en-scène et les défis que représente un tel exercice lorsqu’on vient du cinéma. Elle a aussi évoqué sa propre trajectoire de femme noire dans le paysage artistique français, faisant écho aux batailles d’Olympe.
Le spectacle sera diffusé à Paris, du 13 mars au 6 avril, au Studio Hébertot (78 bis Bd des Batignolles, 75017 Paris), et il serait dommage de passer à côté. Car Olympe de Gouges, que l’histoire a voulu effacer, ressuscite ici dans toute sa splendeur, portée par une comédienne qui lui redonne la place qu’elle mérite.
📅 Dates et réservations :
📍 Studio Hébertot, Paris – Du 13 mars au 6 avril 2025
🎟️ Billets disponibles sur place ou en ligne : studiohebertot.com/spectacles/olympe